Depuis la crise économique d’automne 2008, les prix de l’immobilier – en Suisse comme dans la majeure partie des pays occidentaux – ont pris une tendance foncièrement inflationniste. La politique de taux d’intérêt extrêmement bas appliquée à partir de là par la Fed (Réserve fédérale des États-Unis) a fait son effet. De surcroît, l’agir de la Fed a entraîné dans son sillage celui de plusieurs autres Banques nationales mondiales – la Banque nationale suisse faisant partie du lot. Ce faisant, l’accès au crédit hypothécaire étant facilité, les agents économiques se sont en quelque sorte rués sur les biens immobiliers potentiellement accessibles à leur propriété. C’est ce phénomène qui est donc à l’origine de la forte demande sur le marché immobilier occidentale et par extension de la flambée des prix de la pierre en Suisse. S’agissant du cas de la Suisse, nous pouvons faire ressortir le fait suivant : en dix ans, les taux hypothécaires, pour un engagement de durée équivalente, ont été divisés par moins d’un tiers – atteignant par là un plancher historique. Ainsi en 2008, les banques commerciales helvétique proposaient des crédits pour 10 ans à 3.5% environ, ce taux pouvait être – à un moment donné – négocié par les clients en 2017 avec la majorité des banques aux alentours de 1.3% (plancher historique). Nous pouvons compléter et illustrer nos propos à l’aide les estimations faitespar le site Comparis.ch, selon lesquelles les prix ont augmenté de 50% environ entre 2007 et 2017 sur l’ensemble du l’arc lémanique.

Avertis par ce contexte, nous pouvons maintenant nous poser la question de la pertinence pour un résident étranger d’acheter un bien immobilier en Suisse. Étant donné que la pierre jouit traditionnellement d’une réputation d’investissement sûr et que la Suisse est habituellement vue comme un îlot de stabilité au sein du monde, l’achat immobilier peut y être appréhendé comme un investissement refuge ou tout simplement pour y avoir un pied-à-terre. Toutefois, la concrétisation d’un tel souhait ne se fait pas sans conditions cadres en matière de législation.

La vente pour des personnes physiques domiciliées à l’étranger est donc soumise à différentes lois et ordonnances. Nous pouvons, par ailleurs, ici faire ressortir le fait que les citoyens étrangers qui possèdent un permis d’établissement C jouissent d’un droit d’acquisition illimité à l’image des citoyens suisses, tandis que ceux qui possèdent un permis d’établissement B peuvent acquérir un seul bien, sous condition aussi d’y habiter. Les personnes n’ayant aucun permis d’établissement, à savoir les citoyens étrangers, peuvent acheter en Suisse mais sous l’égide d’un inventaire de restrictions. À cet effet, la lex Koller, entrée en vigueur le 1 janvier 1984, régit les conditions d’achat d’un bien immobilier pour un étranger sans permis. Ainsi, un étranger ayant son domicile hors de Suisse peut uniquement acquérir une résidence secondaire dans un lieu où il entretient des relations extrêmement étroites et dignes d’être protégées (art. 9, al. 1, let. c, LFAIE). À noter que le nombre d’acquisition de résidences secondaires est limité à 1’500 pour toute la Suisse, réparti entre les communes à vocation touristique. Seule l’acquisition d’un logement par regroupement familial est permise. L’usage doit être exclusivement privée, de fait, la location est permise de manière périodique, mais de façon réglementée, soit six mois au maximum à l’année. De plus, il est interdit de vendre le logement acquis pendant cinq ans sauf circonstances exceptionnelles.

Il faut aussi ici soulever et préciser que lorsqu’un étranger non-résident en Suisse acquiert une résidence secondaire, il est taxé de la même manière qu’un citoyen domestique. Il doit donc régler chaque année un impôt sur la fortune (80% de la valeur vénale de l’objet) et un impôt sur le revenu (montant dont aurait jouit l’intéressé s’il avait loué son bien au lieu de l’occuper). S’ajoute à cette taxation directe, trois impôts indirects qui vise respectivement l’impôt fédéral, la taxe foncière et la taxe de séjour.

Après avoir fait la lumière sur la panoplie de restrictions, à laquelle doit fait face l’acheteur étranger dans son dessein d’acquérir en Suisse une résidence affectée à l’habitat, nous pouvons souligner que la législation est pour le moins plus tolérante en ce qui concerne l’acquisition et l’exploitation de biens qui ont pour but l’activité économique. Ainsi des immeubles qui servent comme entrepôts, usines de fabrique, de bureaux, de restaurants, d’hôtels, de magasins ou autres centres commerciaux peuvent être vendus à n’importe quel résident non-domicilié en Suisse sans aucune restriction particulière. Ce dernier peut alors en toute liberté user de ses locaux que cela soit au nom de la personne morale qu’il représente, en respectant bien évidemment la loi sur le travail du Canton en question. Il a aussi a possibilité de louer l’objet immobilier à une tierce personne pour l’année – et non pas de manière consignée. Ce genre de bien sont alors intéressants en termes de rentabilité et peuvent servir comme investissement refuge. Il faut, néanmoins, spécifier qu’il reste – à l’image des résidences secondaires – soumis au régime d’imposition classique en Suisse, dont nous avons évoqué les caractéristiques plus haut.

En déblayant les points essentiels de la présente thématique, nous pouvons remarquer le modèle binaire qui est appliqué pour un citoyen étranger en vue de l’accès au droit de propriété en Suisse. Nous sommes en mesure de constater que d’une part, le marché immobilier suisse est fermé de l’intérieur – la Confédération souhaitant par les restrictions mentionnées plus haut instaurer une stabilité politique qui profite aux citoyens domestiques et de jureempêcher la spéculation extérieure. Et d’autre part le marché immobilier helvétique est ouvert en ce qui concerne les objets affectés à l’activité économique. Par cette disposition législative, l’activité des entreprises locales est stimulée stimulées par la potentielle et libre arrivée d’entreprises étrangères concurrentes. Cette harmonieuse tension, contrairement du statisme du marché immobilier de l’habitation, donne un dynamisme au marché immobilier en questionce qui permet des investissements intéressants pour le citoyen non-résident en Suisse.

Ainsi, La LFAIE a pour but de donner la mainmise aux résidents domestiques sur les biens d’habitation afin d’éviter une potentielle régence spéculative de la part d’étrangers non-résidents sur le marché des biens immobiliers privés en Suisse. Cependant, sa flexibilité pour les biens visant une activité économique permet à l’activité économique d’être localement vivifiée. Ce double levier, qui harmonise stabilité politique et dynamisme économique, est le point fort de la législation actuellement en vigueur : la sûreté des ménages privés, tout comme les opportunités économiques domestiques et étrangères sont adossées à la même charpente.